En tant que photographe passionné par les paysages et la nature, je me suis souvent retrouvé plongé dans l’univers visuel captivant des films de Ron Fricke. J'ai découvert son regard aux travers de ses deux œuvres phares : Samsara et Baraka, films sans textes mais chargés de messages. Son travail transcende les frontières entre le documentaire et l’art cinématographique. Ses images ont la capacité de nous transporter vers des mondes lointains, mystérieux et oniriques, mettant en lumière les ethnies de notre planète, les fabuleuses créations de l'Homme mais avant tout, la beauté pure de la nature qui nous entoure.
Photographies extraites du film Samsara (2011).
I - L'artiste :
Ron Fricke est un cinéaste et réalisateur américain, né en 1953, reconnu pour sa maîtrise fascinante de l’art du time-lapse (effet d’accélération réalisé en image par image) et de l’image en très grand format. Il a d'ailleurs conçu un modèle particulier de caméra 70mm pour la réalisation de ses films, afin de satisfaire à son besoin de retranscrire la beauté du monde. Sa carrière cinématographique est marquée par une exploration profonde de la beauté du monde naturel et de la condition humaine. Elle est ainsi teintée d'une approche philosophique et artistique assez peu commune au cinéma.
Fricke a commencé sa carrière en tant que directeur de la photographie sur le film Koyaanisqatsi (1982), réalisé par Godfrey Reggio, film expérimental sans dialogue, accompagné d’une bande sonore hypnotique de Philip Glass. Cela a ouvert la voie à son propre travail visionnaire et l'a mené à réaliser son premier film, Chronos (1985), hommage au temps et à la nature. Mais c’est avec Baraka que Fricke a véritablement capturé l’essence de son style unique.
En tant que photographe, je suis constamment à la recherche d’inspiration pour capturer la beauté brute de notre monde. Mes escapades dans les montagnes et les coins reculés de la nature (grottes et gouffres) sont mon carburant créatif mais le cinéma nourrit mon âme artistique depuis tout jeune. Et parmi les cinéastes qui ont profondément influencé ma vision, Ron Fricke occupe une place de choix, aux côtés d'Hayao Miyazaki.
Je me demande souvent : comment puis-je transmettre cette émotion à travers mon objectif ?
II - L'œuvre :
Parmi ses œuvres, je retiens :
Koyaanisqatsi (1982) : il y intervient en tant que directeur de la photographie et a grandement contribué à rendre ce long-métrage emblématique, qui explore la relation entre l’humanité et la nature à travers de sublimes séquences visuelles ;
Baraka (1992) : il réalise lui-même, tout en assurant la photographie et le scénario ; ce film nous emmène dans un voyage transcendantal à travers des paysages, des rituels religieux et des scènes de la vie quotidienne à travers le monde. C'est un poème cinématographique où chaque plan est soigneusement composé, chaque image raconte une histoire. Trois années de tournage au travers de 24 pays ont été nécessaire ;
Samsara (2011) : Ron Fricke renouvelle ses multiples casquettes pour poursuivre l'expérience de Baraka, tourné cette fois dans 25 pays sur une période de 5 ans. Suite spirituelle directe, “samsara”, en sanskrit, signifie “ensemble de ce qui circule” et “courant des renaissances successives”. Le film nous offre un instantané de la vie autour du monde, constat d'une époque allant à toute allure, oubliant le vaste monde dans lequel nous cohabitons, sa beauté éphémère et l’éternité. Ce film est une méditation visuelle sur la vie, la mort, la spiritualité et la nature.
Bien que ses films soient sans textes ou narrations vocales (pas de voix off comme il est pourtant coutume d'entendre dans les films documentaires), la musique y est primordiale et on retrouve notamment des compositions de Dead Can Dance et son duo mythique formé de Michael Stearns et Lisa Gerrard. En somme, Dead Can Dance a laissé une empreinte musicale puissante dans ces deux films documentaires (Baraka et Samsara), ajoutant une dimension émotionnelle profonde aux images captivantes, embellissant des années de travail. Si vous ne les connaissez pas, je vous recommande chaudement de les écouter !
Musique extraite de Samsara, par le duo Dead Can Dance
Avec le clip ci-dessus, vous aurez droit à de nombreuses images extraites du film. Ainsi, Samsara nous fait découvrir des endroits fascinants, dont le monastère de Taktsang Palphug au Bhoutan, perché sur une falaise à 3000 mètres d’altitude ; la ville de Varanasi en Inde, où les rituels funéraires se déroulent au bord du Gange ; le désert de Namib en Namibie, avec ses dunes rouges et ses paysages lunaires.
Baraka, quant à lui, nous transporte à travers des lieux emblématiques tels que Angkor Wat au Cambodge, avec ses temples majestueux ; le mont Athos en Grèce, où les moines vivent en harmonie avec la nature ; le désert du Sahara, avec ses dunes infinies et ses oasis mystérieuses. Mais la scène des Dervishes tourneurs m'avait profondément ému lors de mon premier visionnage ! Ainsi que le rituel balinois "Kecak" où les hommes chantent ensemble, en arc de cercle, mené par leur prêtre (si vous avez vu le film, vous verrez parfaitement de quelle scène il s'agit 😉).
Ces lieux emblématiques sont autant de fenêtres ouvertes sur la beauté et la diversité de notre planète, immortalisées par l’objectif visionnaire de Ron Fricke.
Ron Fricke a la capacité rare de transformer des paysages en symphonies visuelles. Ses films sont des invitations à la contemplation, à la réflexion et à la célébration de notre monde. En tant que photographe, je m’efforce de capturer ne serait-ce qu’une fraction de cette magie dans mes propres images. Je nourris le désir de pouvoir revoir ses films dans une salle de cinéma, avec une qualité optimale (tant pour la vidéo que pour le son !).
Ron Fricke a dit un jour : “Je sens que mon travail a évolué au travers de mes films. Autant techniquement que philosophiquement, je suis prêt à creuser plus profondément mon thème favori : la relation humaine à l’éternel.” Ces mots résonnent en moi, et je continue d’explorer cette relation à travers mes photographies.
Face à un paysage majestueux, prenez un moment pour contempler l’éternité qui vous entoure. Nous ne sommes pas grand chose dans l'univers.
III - Liens et sources :
Le site non officiel mais dédié à ces oeuvres, par Darren Lambert : Spirit of Baraka.
La page Wikipédia sur Ron Fricke.
Photographie extraite de Baraka
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